Depuis 2022, la répartition 60/40 fait l’objet de remises en cause fréquentes, ses performances ayant déçu face à la volatilité persistante des marchés. Des gestionnaires institutionnels revoient désormais la composition des portefeuilles classiques, privilégiant parfois une allocation 30/70 pour préserver le capital.
Les prévisions à dix ans du S&P 500 affichent des rendements attendus nettement inférieurs à leurs moyennes historiques, selon plusieurs grandes maisons de gestion. Cette tendance nourrit le débat sur la pertinence des modèles traditionnels et accélère l’adoption de nouvelles philosophies d’investissement.
Pourquoi le portefeuille 60/40 ne fait plus l’unanimité auprès des investisseurs
Le modèle 60/40, mélange classique de 60 % d’actions et 40 % d’obligations, a longtemps été considéré comme la référence absolue pour construire un portefeuille équilibré. Cette recette, héritée de la théorie moderne du portefeuille d’Harry Markowitz, promettait un compromis entre rendement et gestion du risque, tout en s’appuyant sur la diversification. Mais dans la réalité, les marchés n’ont pas suivi le scénario prévu.
Depuis la crise financière de 2008, la mécanique s’est enrayée. Les liens entre actions et obligations se sont resserrés, surtout lors des grandes secousses. Autrefois opposées, ces deux classes d’actifs ont parfois chuté de concert, ruiné l’espoir d’une protection systématique du capital. Les grands gestionnaires, assureurs, fonds de pension, ne se contentent plus d’appliquer des recettes toutes faites.
Voici les principaux griefs adressés à ce modèle devenu trop prévisible :
- Rendements obligataires affaiblis par des années de taux très bas, puis malmenés par des hausses soudaines des taux directeurs.
- Marchés actions plus nerveux que jamais, avec des performances concentrées sur quelques poids lourds, et des phases de correction souvent brutales.
- Gestion du risque rendue plus délicate par une volatilité accrue sur l’ensemble des actifs.
Face à ces mutations, les professionnels de l’asset management adaptent leur stratégie. L’équilibre d’autrefois ne suffit plus : ils doivent repenser la diversification, revisiter les pondérations et trouver de nouveaux leviers pour préserver la performance sans sacrifier la stabilité. La crise financière a laissé des traces, imposant une remise à plat des certitudes sur le fameux portefeuille équilibré. Fini le temps où une allocation standard assurait une progression régulière : la donne a changé.
Portefeuille 30/70 : quelles performances et quels risques dans le contexte actuel ?
Le portefeuille 30/70, avec sa majorité d’obligations et une dose réduite d’actions, attire ceux qui privilégient la sécurité du capital. Son objectif est limpide : amortir les soubresauts des marchés financiers tout en conservant une perspective de rendement. Sur cinq ans, les grandes sociétés de gestion estiment que ce type de profil a généré un rendement annuel compris entre 2 % et 3,5 % (frais courants déduits sur la plupart des produits financiers).
Pendant longtemps, les faibles taux ont pesé sur les placements obligataires. Mais la montée de l’inflation, le retour des taux d’intérêt et la volatilité persistante sur les marchés actions ont redistribué les cartes. Certes, la prudence du portefeuille 30/70 limite les gains lors des rallyes boursiers. Mais ce positionnement protège des revers majeurs, comme ceux causés par les guerres commerciales, la pandémie ou les tensions géopolitiques récentes. À chaque crise, ce modèle a démontré une vraie résilience.
Cet équilibre attire surtout ceux qui investissent à court ou moyen terme, soucieux de ne pas exposer leur épargne à des risques excessifs. Cependant, la faible part d’actions ne permet pas de profiter pleinement des envolées des marchés émergents ou des entreprises en forte croissance. Pour compenser, il faut affiner la répartition entre classes d’actifs, soigner la sélection des supports et ajuster le pilotage au fil des cycles économiques.
Vers de nouvelles philosophies d’investissement : quelles perspectives pour la prochaine décennie ?
L’accélération technologique, la montée en puissance de l’intelligence artificielle, le développement des marchés asiatiques et le bouleversement des repères monétaires : autant de facteurs qui remodèlent la gestion de portefeuille. Désormais, particuliers avertis et investisseurs institutionnels bousculent leurs cadres. Se limiter aux duos actions–obligations n’offre plus la flexibilité nécessaire pour affronter la volatilité et maintenir un rendement attractif sur la durée.
Les approches évoluent rapidement. Certains gestionnaires optent pour une diversification plus large, intégrant des actifs comme les infrastructures, la dette privée ou des positions spécifiques sur les marchés émergents. D’autres préfèrent cibler des thématiques : intelligence artificielle, climat, entreprises innovantes à la Nvidia. Le Royaume-Uni et les États-Unis, souvent précurseurs, servent de modèles à une gestion européenne de plus en plus audacieuse.
Pour illustrer la diversité des nouveaux leviers d’investissement, deux tendances fortes se dégagent :
- Gestion quantitative : l’utilisation d’algorithmes et l’automatisation des choix d’actifs s’imposent progressivement.
- Approche multicritères : analyse fine des cycles, intégration des critères ESG, gestion dynamique des risques.
Malgré la mémoire encore vive de la crise financière de 2008-2010, certains principes restent solides : discipline, vision à long terme, et orchestration précise des allocations. C’est désormais à la croisée des innovations technologiques, de la gestion active et d’une maîtrise affûtée du risque que se dessinent les stratégies de demain. L’avenir du portefeuille ne se joue plus sur une formule figée, mais dans la capacité d’adaptation face à un terrain mouvant.